• Tableau machine, Comment ça marche, huile sur toile, 2,00x2,50m, 2015
  • Tableau machine, les laveurs de tableaux, 1.00 x 1.25 m huile sur toile, 2015
22 décembre 2015

tableaux machines

2012 ————————————

Tableau machine, comment ça marche, huile sur toile, 2,00 x 2,50 m

Mais, comment ça marche ?

Diderot parlait du tableau comme d’une machine à voir, un dispositif mettant en scène des objets, des personnages et des architectures… Une peinture construite sur le passage et la contiguïté des éléments comme dirait Pincemin, nécessaire pour faire peinture.

Nous avons devant nous un dispositif fait de tables et de tableaux d’école, une salle de classe à ciel ouvert, l’endroit où l’on apprend peut-être à faire marcher la machine. Les tableaux verts, la couleur du tableau d’école, celui-ci mobile que l’on peut faire pivoter verticalement et horizontalement. Les inscriptions écrites à la craie racontent la méthode utilisée par AD. Le tableau d’école, une surface où l’on transmet le savoir, un savoir qui sera effacé pour être réécrit et effacé à nouveau et ainsi de suite, une analogie à l’histoire de la peinture, un espace toujours remis en question, le monochrome une table rase pour remettre les compteurs à zéro, infatigable espace. Mais dans ce tableau pas de murs, des tableaux dans l’espace sur un sol qui nous rappelle les dallages des annonciations. A cette époque la peinture était architecture, des espaces étaient créaient pour elle et par elle. Un espace dans l’espace.

Parmi les personnages, on en voit un qui tient apparemment son nom, un papier plié en deux, petit objet que le maître demande aux enfants pour les identifier. On peut lire l’inscription, Auguste Herbin, c’est un peintre français, abstrait de la première période du XXe, méconnue du grand public, c’est peut-être pour cette raison qu’il n’a pu avoir de place sur l’une des tables, une manière de nous le rappeler et en même temps de rendre hommage à cet artiste. On s’aperçoit que son costume a été crée avec des F3D et nous rappellent le Bauhaus de Schlemmer. À la droite de A. Herbin, Henri Focillon, lui aussi habillé à la mode F3D joue de la clarinette, il semble mettre en musique la vie des formes, ce qui donne un air féerique à la scène. Sur le tableau qui lui fait face, une partition, assez grande pour être joué par H. F, mais que joue-t-il, on peut lire la ré si fa si la do ré, jouer sur toute les formes et non sans humour. Il reste deux personnages, et il semble que celui qui écrit sur le tableau n’est autre qu’Alain Doret … . Au fond, on reconnaît K. Malevitch portant une mallette avec l’inscription 010, l’exposition suprématiste, l’homme qui disait que cette excitation qui alimente l’esprit était la forme par excellence, une fois matérialisée, elle disparaît. Il ne reste plus qu’à l’artiste à repartir à la recherche d’une autre forme plus parfaite.

Lida Tanero, Le Tableau Machine, janvier 2016.

 

 

Tableau machine, Comment ça marche, huile sur toile, 2,00x2,50m, 2015

Tableau machine, Comment ça marche, huile sur toile, 2,00×2,50m, 2015

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2012 ————————————

Tableau machine, les laveurs de tableaux, huile sur toile, 1,00 x 1,25 m huile sur toile, 2015

 

Avoir les yeux plus gros que le ventre, voici une maxime que l’on entend quand on désire plus que notre corps ne peut accepter. La légende de sainte Lucie serait la plus appropriée à ses deux yeux posés dans une assiette reprenant la forme d’un œil dû à la perspective, œil pour œil, dent pour dent, image pour image, peinture pour peinture…

Sainte Lucie s’est arrachée les yeux et les jeta à la mer pour ne pas être détournée de sa foi. La vierge Marie en réponse à cette dévotion lui rendit la vue et lui offrit des yeux plus beaux et plus lumineux, des yeux qui dans ce tableau sont les seuls à nous regarder, des yeux qui habitent un coquillage. Je vous vois, je te vois toi qui me regardes, que regardes-tu, que désires-tu, que me veux-tu.

Les grands tableaux ont été effacés, nettoyés, enfin presque, des mots persistent des mots qui n’ont pu être enlevés ? Comme disait Marcel Duchamp, jeux de mots, jeu de vilain une expression que l’on n’utilise pas comme au XIV siècle où l’on en venait aux mains, mais plutôt un jeu de mots à la Magritte, ce Merleau-Ponty Marin un bon cru que l’on aime à voir et revoir.

 

Un autre tableau n’a pas encore été effacé où les laveurs semblent avoir été interrompus dans leur travail, les personnages semblent se poser des questions quant à la nature de ces formes représentées. Que nous racontent ces signes, ces marques d’une autre civilisation que l’on ne peut déchiffrer impuissant, ignorant fasse à ce langage, que nous reste-t-il ? Ce que l’on appelle le langage des formes, notre imaginaire, celui de l’homme à vouloir créer d’autres formes plus complexes. Comme disait Nietch l’homme est une créature inventive de formes et de rythmes, c’est à cela qu’il est le mieux exercé et il semble que rien ne lui plaise autant que d’inventer des formes. L’homme, une formidable machine à créer des formes.

 

Si l’on compare les personnages aux Bergers d’Arcadie de N. Poussin, cela ne fait plus de doute, c’est une référence qui fait sens quant à l’idée de construire la peinture propre à N. Poussin qui selon le célèbre ouvrage de louis Marin Détruire la peinture où il confronte deux approches de l’art de peindre au travers de deux tableaux Les Bergers d’Arcadie et la Tête de Méduse du Caravage.

AD semble ici nous ramener à l’origine, au procès de représentation ( p.37 détruire la peinture, 1977, Édition Flammarion) quant à la manière différente qu’on ces peintres de peindre, de représenter, de présenter l’idée, cette chose mentale qui part la suite prendra forme par la matière.

AD utilise un système de représentation narrative où il fait référence à l’histoire pour raconter sa propre histoire dans l’histoire. Les personnages tiennent de longs bâtons qui sont les outils pour laver les tableaux de longues serpillières en forme de tête de méduse, la référence précise ce combat cette lutte que l’artiste à de donner à voir et d’être vu.

La Gorgone, ça peut-être aussi une autre histoire du tableau, c’est-à-dire quelque chose que l’on n’ose pas regarder, voir en face, un tableau qui nous renverrait nos pensées en images, nos faiblesses, notre impuissance à faire fasse. Comme disait Marcel Duchamp, c’est le spectateur qui fait l’œuvre, car le tableau n’est que le miroir de l’esprit et l’image qu’il renvoie, n’est autre que la pensée mise en images par celui qui regarde, une image qui peut vous pétrifier, vous changer en pierre. On dit bien, ça me parle, pourtant le tableau ne parle pas, pas plus qu’un miroir, mais alors qui parle ? Le discours du tableau serait une conversation que l’on aurait avec soi-même, l’esprit œil. Pour ne pas être foudroyé, Percé use d’une ruse en utilisant son bouclier pour renvoyer à Méduse son propre regard, ce qui lui permettra de tuer la bête. Le tableau reste ce miroir à l’image de la gorgone un combat, un jeu qui peut se jouer à plusieurs contre l’œil esprit.

 

Lida Tanero, Tableau Machine, Les laveurs de tableaux, avril 2016.

 

Tableau machine, les laveurs de tableaux, 1.00 x 1.25 m huile sur toile, 2015

Tableau machine, les laveurs de tableaux, 1.00 x 1.25 m huile sur toile, 2015